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Requins à La Réunion

-une tragédie moderne-

Racisme ordinaire et milieu scolaire... et ailleurs

 (Avertissement : âmes sensibles au racisme s'abstenir. Toutes les captures d'écran présentées sont PUBLIQUES et sont représentatives de la "bonne ambiance" qui règnent dans les forums internets locaux à propos du risque requins depuis plus de 5 ans)

Le glissement ethnique de la crise requin a été mis en évidence dès 2011 dans les deux études sociologiques de référence[1] menées à ce sujet : «Les sports nautiques sont majoritairement pratiqués par les métropolitains (Duret, Cubizolles, Naria, & Maillot, 2008). Dans ce cadre, porter sur la scène publique le débat conduit à son ethnicisation et à la nécessité de déconstruire l’image stéréotypée du surfeur «bon à rien». »

(MAJ 2020 : la dernière étude menée par la même sociologue Marie Thian Bo force le trait, en présentant le développement balnéaire et les activités nautiques comme une culture exogène imposée sans tenir compte des usages et traditions locales, d'où son rejet. Voir ici un extrait en lien)

Cette dérive, aussi réelle que tabou, est un peut être le thème le plus délicat abordé dans le livre "Requins à la Réunion une tragédie moderne".

Une expression artistique des défenseurs des "requins patriotes"

 Il y a dans l’imaginaire des stéréotypes très forts, entretenus dans l’opinion par une mouvance identitaire. Ainsi, bien malgré eux, les requins « réunionnais » seraient devenus des instruments inespérés de châtiment des « néo-colons », accusés maintenant de vouloir « coloniser l’océan » après s’être accaparé les terres.

Ainsi, le pourrissement de cette crise et les dérives racistes associées, auront été favorisées et amplifiées par les réseaux sociaux.

Un exemple de racisme ordinaire "toléré" (les propos racistes sont "normalement" punis par la loi) à propos un article qui "osait" juste faire juste état d'un retour  des compétitions de surf à l'île de la Réunion en février 2016 (lien vers l'article)

sur la page du sénateur maire de St André après la mort d'Alexandre

 

 Il n’est pas étonnant dans un tel contexte de constater qu’ici, beaucoup d’enfants considèrent, au même titre qu’une partie des adultes, que « les requins n’attaquent que les blancs ».

Et aussi surprenant que cela puisse paraître, cette histoire de couleur de peau fait débat depuis longtemps, comme en témoigne cet extrait d'un excellent ouvrage.

 Et aussi déjà dans l'étude de Gery Van Grevelynghe

 En attendant, la décence nous empêchant de montrer les photos de victimes locales sombres de peau des années 1980/1990, à cela nous répondons que "dans la mer le sang est rouge, que l’on soit blanc ou noir". Mais cela ne suffit pas bien évidemment pas à apaiser cette expression des rancœurs du passé.

  Cette situation met en jeu les fondements mêmes de l’unité de notre peuple, et conduit à interroger sur l’avenir du modèle d’harmonie ethnique[2] que sont censés représenter les territoires d’outre-mer, et notamment de l’île de la « Réunion ».

 

On ne peut dès lors que s’indigner des contenus proposés par le muséum d’histoire naturelle de la Réunion en 2015, et validés par le rectorat de l’académie. Dans une partie au sujet des hypothèses explicatives possibles des attaques de requins, le document pédagogique à l’attention des professeurs demande à ceux-ci de faire émerger chez les élèves l’idée de « l’origine réunionnaise ou non des victimes ».

Au-delà du dernier item sur l'origine des victimes, le décryptage de ce document nous permet de comprendre le cœur de la manipulation à l’origine des polémiques :

- « l'activité pratiquée » renverrait à l'idée d'un "surfeur responsable" qu’il conviendrait de stigmatiser, alors qu'il y a eu plusieurs baigneurs et même un chien, ou encore 3 embarcations.

- « l'heure des attaques » renverrait à l'imprudence de ces mêmes surfeurs, coupable de se mettre à l'eau à la tombée de la nuit. Pourtant plusieurs attaques sont survenues en milieu d'après-midi ou le matin.

- évoquer les « Les conditions météo, l’agitation de la mer » permet d’amener les enfants à penser que les attaques se produisent que lorsqu'il y a des vagues, et donc sur les surfeurs. Pourtant beaucoup d'attaques ont eu lieu par mer d'huile.

- L’influence de la « saison touristique » comme moment principal des attaques renvoi à l’argument généraliste d’une corrélation entre l’augmentation du nombre d’attaques et l’augmentation du nombre de personnes dans l’eau. Or chez nous c’est tout l’inverse puisque l'océan est déserté depuis 2012, et que de surcroît celles-ci surviennent plus l'hiver que l’été, au moment le moins touristique.

 En résumé, ce document invite donc les enseignants qui visitent cette exposition à suggérer aux enfants que :  «  les attaques à l’île de la Réunion concernent des « surfeurs non réunionnais se mettant à l’eau en fin de journée quand qu’il y a de grosses vagues », voire au pire « des touristes non réunionnais qui ne connaissent pas que risque requin ».

 

 Suite à une intervention[3] dans le but de dénoncer ce dérapage (vraisemblablement parfaitement assumé et contrôlé) des "référents" pédagogiques du rectorat, le propos visé a été immédiatement retiré. Depuis d’ailleurs, l'institution publique demande à ce que tous les documents destinés aux élèves, proposés par les partenaires institutionnels tels les musées, fassent désormais l’objet d’une validation. Il était temps...

Voir l’article à ce sujet ci dessous, en date du 25 septembre 2015, et notre analyse à ce propos (cliquez ici)


 Il convient désormais est plus que jamais d’être vigilant car la résolution de la crise requin à la Réunion, qui n’est que le reflet d’une profonde crise de société, tant au plan local que national, passera forcément par l’éducation. L’École, qui prétend pourtant  faire de la lutte contre les stéréotypes[4] une priorité pour endiguer l’extrémisme, ne pourra pas rester indéfiniment insensible voir partisan[5] dans cette histoire.

 

 

Nb : Amener en milieu scolaire tout les enfants par exemple à faire l’amalgame entre « être Charlie » et « être contre le terrorisme » n’est pas sans poser quelques questions, quand on connaît par exemple le positionnement extrémiste et idéologique de ce journal vis-à-vis, notamment, de la cause animale. Voir sa libre expression "poétique" ci-dessous, dans le cadre de la crise requin, en réponse à un décès -Alexandre Rassiga le 23 juillet 2012- et une double mutilation -Fabien Bujon 5 aout 2012- (Fatwa de Charb dans  8 aout 2016). Vu les moyens mis au service de l'entretien d'un climat d’opprobre envers les pratiquants nautiques à la Réunion, espérons que cette véritable incitation à la haine et au "racisme" envers "le surfeur" ne devienne pas un jour le sujet d'une étude de texte...



[1] « Le risque requin, mise en risque de la pratique du surf à la réunion », Marie Thian­bo Morel, revue STAPS n°99, « De l’incertitude à l’incertain », mars 2013, et « Approche sociale de la crise requin ». Direction de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement de La Réunion (DEAL), Arnold Jaccoub. Octobre 2014. Lien : http://www.info­ requin.re/IMG/pdf/Etude_socio_­RAPPORT_DEAL_­_Approche_sociale_de_la_crise_requin_­.pdf

[2] Voir cette publication du premier ministre http://www.lepoint.fr/politique/manuel-valls-les-outre-mer-sont-la-plus-belle-reponse-a-le-pen-11-04-2015-1920377_20.php

[3] Il est fort probable que sans notre intervention, ce document n'aurait jamais été modifié. Voir ici un autre article suite à notre action http://www.zinfos974.com/L-origine-non-reunionnaise-des-victimes-d-attaques-de-requins-Une-question-anticonstitutionnelle_a91702.html

[4] Comme l'indique à plusieurs reprises les nouveaux programmes scolaires de l’ E.M.C. (Education Morale et Civique) de juin 2015.

[5] La quasi-totalité des contenus proposés au niveau scolaire à propos du risque requin sont idéologiques et ne vise qu'à entretenir la stigmatisation des surfeurs. Dans le meilleur des cas, ils invitent à fermer définitivement l'océan, en totale contradiction avec les principes du développement durable, et également les principes du Grenelle de la mer en 2009, qui plébiscitent le développement d'activités non polluants telles que le surf (article 57a).

 

 Voici quelques extraits de commentaires qui ornent systématiquement chaque publication qui aborde le sujet des requins de l'océan ou des surfeurs :

 les commentaires tolérés sur le site d'une chaîne de télé locale après une attaque en 2014

 

Les commentaires "tolérés" sur le page de la Présidente du conseil général de l'île de la Réunion après la mort du jeune Elio en avril 2015

 

 Les pages identitaires font le jeu de l’État en chargeant UNIQUEMENT la responsabilité individuelle. Elles amplifient le phénomène de stigmatisation presque  chaque attaque, accusés de "détruire l'économie et l'image de l'île". Mais s'oppose de façon contradiction à la politique de réduction du risque par la pêche, pourtant la seule efficace. 2 exemples :

 

 

Même un groupuscule anti-colonialiste antillais ("les décolonisés") basé en France s'est saisis de "l'aubaine" que constitue les attaques de requins pour inciter à la "décolonisation", en détournant une affiche publicitaire de l'Ile de la Réunion Tourisme (cliquez ici pour le lien)

 

Les réactions à une simple interview  (cliquez ici) du papa d'Elio en septembre 2015, 6 mois après la mort de son fils

Ici encore des réactions très récentes d'individus qui cherchent par tout les moyens à entretenir le clivage sur la page Océan Prévention Réunion:

 

 

 

Sans oublier les "collectors" du début de la crise :