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Requins à La Réunion

-une tragédie moderne-

Sauvons la poule aux « eaux d’or » !

 

 

 Ce lundi 26 juillet 2021, nous fêtons les 8 années d’interdiction « temporaire », soit 2922 jours de privation d’accès à notre océan.

Hasard du calendrier, c’est aussi ce 26 juillet que 2 réunionnais sont en lice pour représenter la France en surf aux Jeux Olympiques de Tokyo. Une consécration pour notre île, véritable paradis pour les activités nautiques, enviée par toute la planète pour la quantité, la qualité et la régularité de ses vagues. En espérant que cela contribuera à asseoir cette discipline, et le potentiel de développement qu’elle représente, au sein du paysage sportif local, et par-delà au sein de la société réunionnaise.

 C’est également en ce moment que le président Emmanuel Macron rend une visite officielle à Tahiti, qui accueillera l’épreuve de surf des Jeux Olympiques de 2024. Un événement moteur d’un point de vue économique, qui aurait pu revenir à l’île de la Réunion si nous n’avions pas été sacrifiés sur l’autel de l’écologisme pour quelques poissons...

  Rappelons en effet que nous n’avons à la Réunion malheureusement aucune chance d’accueillir un jour les JO dans d’autres disciplines. Ni nos terrains de handball, de football, nos pistes d’athlétisme ne feraient suffisamment rêver pour imaginer rivaliser avec les stades métropolitains. Non, la seule et unique chance de séduire les dieux de l’Olympe, c’est notre territoire sauvage, nos montagnes, ou encore notre océan et nos vagues exceptionnelles. Et tout l’enjeu est justement d’ouvrir les yeux de la population réunionnaise sur notre patrimoine nautique incroyable, jadis tant redouté, mais désormais hautement convoité grâce aux activités nautiques, qui ces dernières décennies ont réussi à valoriser notre océan tourmenté pour en faire un atout jalousé.

 Le président de la République, bien conscient de cette situation invivable pour une île, avait promis d’ailleurs lors de son dernier passage de rendre la mer aux réunionnais pour 2022. Il s’est bien sûr gardé de préciser si ce serait avant ou après l’élection, rangeant cet engagement de 2019, dans un contexte d’interdiction maintenue, au titre d’énième « promesse » de campagne ?

Ironie du sort, en ce moment se termine le tournage d’un film intitulé « Hawaii », tourné malicieusement sur nos plus belles plages, pourtant ornées de panneaux d’interdiction de baignade. Qui pourrait croire un seul instant qu’à Hawaii, berceau du surf, la population aurait accepté une telle fermeture indéfinie de l’océan ? Un mépris de plus pour ceux qui vivent cette situation soigneusement minimisée par nos autorités et institutions notamment touristiques, bien plus soucieuses de cacher nos problèmes endémiques que de les résoudre.

 

 La période actuelle de trêve d’attaque de requin depuis 2 ans est une très bonne nouvelle, mais on est conscient que le risque demeure bien réel, puisque les principales avancées nécessaires sont toujours refusées :

- la possibilité de sécuriser convenablement la baignade et les activités nautiques dans une Réserve Marine, qui a phagocyté depuis 2007 notre unique zone littorale balnéaire, en donnant plus de droit à un poisson qu’à un humain,

- l’exploitation durable des poissons pêchés par la levée de l’interdiction de commercialisation, déterminante dans le cadre de l’acceptabilité sociale de la pêche préventive,

- et enfin un travail en profondeur pour réconcilier les Réunionnais et l’océan récréatif, toujours perçue en tant que culture « exogène » imposée.

 

 Notre victoire récente dans le 19e canton n’est pas celle d’une personne ou d’un binôme, mais bien celle d’un combat mené pour l’avenir d’une île qui ne peut se complaire, par médiocrité et manque de courage, à rester indéfiniment le dos tourné à la mer. C’est dans ce sens désormais qu’il nous faut travailler, avec la légitimité que cette dernière élection nous aura attribuée.

 

 Jean-François Nativel, auteur du livre "Requins à la Réunion une tragédie moderne", conseiller départemental 19e canton de l'île de la Réunion.